dimanche 28 mars 2021

LA FABRIQUE DE L'IGNORANCE

 


La science a toujours entretenu des rapports complexes avec l'autorité. Au XVIeme  siècle Coppernic et Galilée en firent les frais. Un passionnant reportage " La fabrique de l'ignorance "  (Arte/Pascal Vasselin /Franck Cuveillier) décrypte la stratégie des industriels après guerre qui plutôt que de nier les méfaits de leurs petits commerces oriente la recherche au service de ses intérêts. Tout débute avec l'affaire des cigarettiers américains (Big Tobbacco) niant les méfaits du tabac et du tabagisme passif. S'ensuivent celles du Round-up et Gaucho sur la mortalité des abeilles, du Chlordecone sur les cancers et la pollution des sols,  du Bisphenol et des perturbateurs endocriniens jusqu'aux "conclusions" sur les maladies infectieuses, les nitrates et les algues vertes, les dangers du pétrole de schiste, du diesel et des particules fines, le nucléaire et le changement climatique. En 92/93 afin d' allumer un contre feu au sommet de la terre de Rio, l' appel d'Heidelberg est lancé. Par une prouesse de communication pervertissant le débat public, un détournement du langage, la communauté scientifique dans son immense majorité le signe, ignorant qu'il est à l'initiative des industriels de l'amiante. Après avoir mis en lumière les procédés de duperie, le reportage s'attarde sur les mécanismes psychologiques, les biais cognitifs qui leurrent notre cerveau et nous font accepter l'inacceptable: statu-quo/optimisme qui refuse tout changement à notre frénésie de consommation, de voyage, notre façon de produire ou  complotisme qui brave le consensus scientifique. La globalisation, la discussion planétaire, les tweets assassins, le recrutement numérique font le reste dans cette guerre de territoire.  La science s'est monétisée. Celle qui ne rapporte pas est laissée pour compte devenant une non-science, une "junk science" face à une "sound science" qui sert la liberté individuelle, le libre marché et le moins d'état. Les écologistes deviennent des communistes masqués, pastèques "vertes à l'extérieur, rouges à l'intérieur"... la boucle est bouclée, la planète crame, s'atomise, se plastifie. Le vivant est en danger. Saviez-vous que cette étude de la production culturelle d 'ignorance, de doute et de désinformation s'appelle l'agnotologie?  Allez ... un aphorisme pour la route: "Puisque il est dans la nature de la science de douter, la vérité est du côté des sceptiques" Imparable non?

Appel D'Heilderberg extrait

« Les plus grands maux qui accablent notre Terre sont l'ignorance et l'oppression, et non la science, la technologie et l'industrie dont les instruments, lorsqu'ils sont adéquatement gérés, deviennent les outils indispensables à un futur façonné par l'Humanité, par elle-même et pour elle-même, lui permettant ainsi de surmonter les problèmes majeurs tels que la surpopulation, la famine et les maladies répandues à travers le monde. »                        Qui ne signerait pas cela?


mercredi 24 mars 2021

LES DAMNÉS DE LA COMMUNE




Arte nous offre un magnifique documentaire sur l'histoire de la Commune (Graphiste et réalisateur Raphaël Meyssan). L' immersion dans le Paris du Second Empire à terre, de la guerre Franco-Prussienne, de la jeune République Versaillaise et de la Semaine Sanglante se fait dans ce film unique à travers des gravures de l'époque subtilement animées et des commentaires inspirés. Yolande Moreau, Simon Abkarian et d'autres offrent leur voix à Thiers, Blanqui, Favre, Vallès, Varlin, Clément, Louise Michel ou Victorine. La fresque, fluide, poétique et documentée éclaire sur l'espoir, puis le chaos  du grand incendie démocratique et populaire éteint dans le sang et dont les francs-maçons payèrent le prix. Rendons aussi hommage aux illustrateurs, dessinateurs et graveurs du XIXème à la technique époustouflante qui ont su donner vie à ces "Damnés de la Commune" aux regards incandescents, aux rêves si grands qu'ils nous interrogent sur les nôtres. Les morsures d'acide mordant le cuivre, les entailles profondes des pointes sèches, l'encre noire scarifiant la page, témoignent au son du canon de la violence d'une Histoire marquée au fer rouge  


lundi 22 mars 2021

UN NANAR POUR UNE ANAR

 
André Gide nous avait prévenu "
On ne fait pas de la bonne littérature avec des bons sentiments". Preuve par l'image... du bon cinéma, non plus ! A l'heure où l'on célèbre les martyrs de la Commune, le film Louise Michel la rebelle (2008/SylvieTestud) en fait la probante démonstration. Ils ont du s'emmerder ferme les déportés de Nouvelle-Calédonie, parce que nous aussi. Tout y est: les anarchistes dignes, les méchants matons, les gentils mais primitifs Canaques, la jungle humide, les courriers à Hugo et Clémenceau, l'égérie de la Commune, lisse, vierge rouge sans faille et bonne institutrice, les acteurs qui récitent leurs textes. Saluons l'exploit d'avoir fait un film aussi bourgeois sur des révolutionnaires. Je sais que l'on aborde pas l'art par le biais de la critique, mais... avec l'amnistie de Louise.M arrive enfin la nôtre. Je vais aller relire la bande dessinée Le cri du Peuple de Vautrin et Tardi. S'il vous plait... du souffle-du souffle-du souffle.

jeudi 18 mars 2021

MARS & MUSK

Elon Musk: ce type incarne pour moi la folie du monde, son aveuglement et son consentement au pire.  Le milliardaire-mégalomane ayant déjà acté l'effondrement de la planète mère est prêt à en un investir une autre, hostile, lointaine, pour le salut de l'humanité (ah-ah-ah!) à grand renfort d'intelligence artificielle et de fortune personnelle (100 milliards de dollars). Plutôt que de dépolluer les océans de plastique, d'alphabétiser à tour de bras, ou de vacciner.... Elon préfère envoyer une décapotable rouge tourner dans l'espace, coloniser Mars avec un million d'humains. Rassurez-vous, vous ne ferez pas pas partie des élus... Son fils XAE A-XII peut-être !? Il faudrait  bourrer le fion du canadien avec des bit-coins, ainsi qu'à Trump et quelques autres milliardaires et les envoyer en éclaireurs sur la planète rouge. Si la navette Space X ne fait pas boum au décollage, implorons Mars, dieu du combat, de la jeunesse et de la violence qu'il se contente de ces vieux boucs aveugles et les bouffe tout crus...


L'AFFAIRE LOUIS 14

jeudi 11 mars 2021

LE GRAND MÉCHANT SIGMUND

 



Les bonnes séries, c'est comme les coins à champignons, c'est rare mais ça finit par se savoir. Surtout les gratuites sur Arte. "En thérapie" (de Nakache et Toledano, inspirée d'une série israélienne BeTipul) est de celles-là:  35 épisodes soit 7 séances pour 5  patients seuls ou en couple qui fouillent leur inconscient et s'acharnent à faire ou ne pas faire émerger la névrose, la culpabilité, l'échec, le souvenir qui  pourrit leur vie, ronge la famille ou la vie amoureuse. Les acteurs et actrices sont au sommet, les dialogues aux petits oignons, les personnages attachants. Sur fond d'attentat au Bataclan, nous analysons les fêlures de l'époque, des autres et les superposons aux nôtres. On aurait presque envie d'aller s'allonger sur le canapé rouge du docteur Dayan. Il est vrai que le mauvais rêve actuel nous laisse un peu de temps pour l'introspection et la sinistrose. Vivement le printemps...

dimanche 7 mars 2021

BONNE NUIT LES PETITS

 


Il ne faut jamais revenir sur les lieux de son enfance. Pourtant Google Maps et sa fonction Street view y incite. Au mieux, les lieux n'ont pas trop changé, au pire ils sont méconnaissables. Une ville de banlieue. Vous cherchez le petit bazar de la rue tortueuse montant vers l'église où vous étiez enfant de chœur... or la rue a disparu. Reste l'église. Les panneaux routiers ont déraciné les arbres, le bitume a noyé la terre battue.  Comme un avertissement, le film de Jacques Tati  "Mon Oncle" annonce ce triomphe à venir de la modernité et de sa solitude. C'est l'Histoire me direz-vous ? - un temps meurt, un autre nait. - Oui, à condition qu'une poésie en remplace une autre. Notre société a laissé filer l'art du beau dans la ville. Nos cartes postales de rues piétonnes aux jardinières hexagonales, les mairies bling-bling, les barres grises ne feront pas recette. Et n'allez pas me parler de passéisme ou du charme des lotissements blafards - l'architecture m'est connue... Dans ma tour au 5ème étage, du haut de mes dix ans, les baies vitrées de l'immeuble d'en face  me rassurent.  Bonne nuit. A demain.  Nounours et le Marchand de sable s'éloignent à bord de leur nuage sur un air de pipeau prémonitoire. Pom.Popopom.Pom.Pom. C'était beau, ça ne l'est plus. L'enfance n'a pas tenu ses promesses.

samedi 6 mars 2021

PATRICK DUPOND

 



A star is dead. Patrick Dupond s'est envolé pour un dernier grand jeté. Double pas, cercle de lune puis l'espace infini. La danse devrait être obligatoire à l'école, comme l'art oratoire, le dessin, le chant, la musique... toutes ces disciplines qui libèrent de la gravité, du regard de l'autre, apaisent et rendent imaginatifs. Oui, je sais tambours, peintures, danses, discours et chants de guerre existeraient encore, puisque tout existe mais ils perdraient de la vigueur.  Il y a quelques années j'ai participé deux saisons durant à un cours de danse contemporaine. C'était libérateur malgré mon petit niveau. Corps, espace et temps fusionnaient deux heures de temps, instant arrêté, court moment de vol.  Là haut ou en bas ... danse Patrick, danse avec les faunes Nijinsky, Lifar, Noureev et Pina Bausch: Celle-ci nous souffle  "Dansez, dansez, sinon nous sommes perdus ! "