lundi 22 octobre 2018

LE CORBU


Le plus célèbre des architectes français n'était ni architecte ni français d'origine. Naturalisé en 1930, Charles-Edouard Jeanneret-Gris est né à la Chaux-de- Fonds en Suisse et n'a jamais été architecte en titre. Il  s'en prévalait  d'ailleurs, précisant : En architecture je ne serais jamais un de vos concurrents, puisque j'ai renoncé pour divers motifs... je suis un poète". Poète, révolutionnaire, propagandiste assurément... Il théorise son architecture nouvelle pour un homme nouveau dès les années 20, énonce des règles simples qui mal digérées accoucheront des grands ensembles et réalise quelques villas magistrales à pilotis, toitures terrasses et fenêtres horizontales. Bâtisseur (piètre dit-on...) il est aussi plasticien, designer, écrivain, peintre et sculpteur rejoignant l'avant garde de l'époque. Mais après la crise de 29 "planisme", "purisme", "hygiénisme", "homme nouveau" flirtent avec "Ordre Nouveau. Le Corbusier fricote avec la droite autoritaire, le fascisme, l'antisémitisme, l'eugénisme et s'installe à Vichy durant l'occupation ( comme les frères Perret ) échappant de justesse à l'épuration grâce à Malraux. Avant tout opportuniste, sûr de son exception il navigue entre bolchévisme, fascisme et collaboration pour imposer sa poésie de l'Angle Droit. Ce démiurge qui voulait rendre le monde meilleur et prétendait aux pleins pouvoirs, ne s'est-il pas pris pour dieu auquel il ne croyait pas? Il se noie en 1965, laissant une oeuvre protéiforme qui sera classée au patrimoine mondiale de l'Unesco en 2016. Le Modulor allonge son bras vers le ciel, de magnifiques dessins aux couleurs primaires n'en finissent pas d'exalter le corps, l'ordre, la lumière, l'acier, le béton, les arbres, le soleil, la vitesse, la cité radieuse... Derrière les lunettes d'écaille se dessinent les errements, les utopies mais aussi le génie d'une époque trouble.