dimanche 8 avril 2018

SILENCE






...assourdissant comme le vacarme dans la tête du jeune jésuite Rodrigues enfermé derrière des barreaux de bois, face à la non réponse divine. D'abord toléré à la fin du XVIeme siècle, le christianisme des espagnols et des portugais est ensuite fortement réprimé au Japon vers 1620; le Shogun percevant le danger politique, culturel et économique que représente cette nouvelle doctrine. Torture, martyrs, conversions forcées (e-fumi qui consiste à piétiner l'image du Christ), prêtres apostats: c'est ce que nous décrit Martin Scorsese dans ce qui fut d'abord la réalité, puis un livre de Shusaku Endo (1966) puis ce très beau film. On y perçoit les affres de deux religieux venus comprendre le reniement de leur ancien maître Ferreira (Liam Neeson) et tentés à leur tour pour sauver leurs vies et celles des paysans chrétiens. Les prêtres apostats ont existé (Ferreira -marié-père-converti au bouddhisme- ayant écrit "la supercherie dévoilée" vivra au Japon où il mourra supplicié, s'étant à nouveau parjuré...) On sait que le diable niche dans les détails... Scorsese dit avoir lutté contre son penchant naturel d'en "faire trop", mais le réalisateur réussit ici à déjouer le Malin. L'oeuvre est sobre, belle, les paysages époustouflants, les scènes de supplice filmées par Caravage. Le film est habité, sans effets ni manichéisme. Chacun a  ses peurs, sa foi, ses trahisons, ses lâchetés, sa cruauté, ses raisons qui valent celles de l'autre. Humain, serait le maître mot.