samedi 8 février 2014

DE MONOCEROTE


"Alors, maintenant que nous nous  sommes vues l'une
l'autre, dit la Licorne, si tu crois en moi, je crois en toi."   
 Lewis Caroll -De l'autre côté du miroir

Que reste t-il de cette créature fabuleuse à laquelle la croyance populaire prêtait vie et qui intéressait jusqu'au milieu du XIXe  médecins, théologiens,  ésotéristes, hommes de lettres, poètes, psychologues, historiens...? Ambroise Paré le plus grand chirurgien de son époque la décrit : « son poil était couleur de castor, fort lissé, le cou grêle, de petites oreilles, une corne entre les oreilles fort lissée, de couleur obscure, basanée, de longueur d’un pied seulement, la tête courte et sèche, le mufle rond, semblable à celui d’un veau, les yeux assez grands, ayant un regard fort farouche, les jambes sèches, les pieds fendus comme 


une biche, la queue ronde et courte comme celle d’un cerf. Elle était tout d’une même couleur, excepté un pied de devant qui était de couleur jaune ». On l'associe aux deux facettes de l'être humain, à la virginité, la pureté , la recherche spirituelle , la quête du divin, de l'amour....Elle guérit, ou prévient du poison. On la sculpte, on la peint, ou la brode. On l'appelle: Malicorne. Carl Jung s'en empare dans Psychologie et Alchimie. Ou est-elle? Ou vont ceux qui meurent ? Les gentils, les méchants, les mythes et les créatures fantastiques ? Peut-être qu'ils meurent et c'est tout... Ou peut-être continuent ils à courir dans les grands bois profonds de notre mémoire.

Au galop ! au galop !
J'ai des sabots d'ivoire, des dents d'acier, la tête couleur de pourpre, le corps couleur de neige, et la corne de mon front porte les bariolures de l'arc-en-ciel.Je voyage de la Chaldée au désert tartare, sur les bords du Gange et dans la Mésopotamie. Je dépasse les autruches. Je cours si vite que je traîne le vent. Je frotte mon dos contre les palmiers. Je me roule dans les bambous. D'un bond je saute les fleuves. Des colombes volent au-dessus de moi. Une vierge seule peut me brider.     Au galop ! au galop !       

La tentation de Saint Antoine. Chapitre 7. Gustave Flaubert. 1874